Dans le cas de parents divorcés ou séparés, la responsabilité de plein droit incombe au seul parent chez lequel la résidence habituelle de l’enfant a été fixée, quand bien même l’autre parent, bénéficiaire d’un droit de visite et d’hébergement, exercerait conjointement l’autorité parentale
Qui est responsable de l'enfant mineur auteur d'un dommage ?
Selon le 4e alinéa de l’article 1242 du Code civil, « les père et mère qui exercent en commun l’autorité parentale sont solidairement responsables civilement de plein droit des dommages causés par leur enfant mineur habitant avec eux ».
Cela signifie que les parents peuvent être tenus responsables financièrement vis-à-vis des victimes pour les dommages causés par leurs enfants.
Cette responsabilité civile de plein droit est engagée si trois conditions ci-dessous sont réunies :
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- L’enfant doit être mineur et non émancipé et doit avoir causé un dommage. Il suffit simplement que l’enfant soit auteur d’un acte, même non fautif, à l’origine direct du dommage. Depuis un arrêt de la Cour de cassation de 1984, il n’est plus exigé qu’il ait une faute de sa part. Par exemple, un enfant joue au football dans la cour d’un collège. Il blesse un de ses camarades. La responsabilité de ses parents est engagée.
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- L’enfant doit être soumis à l’autorité de ses parents. En principe, cette autorité parentale est issue du lien de filiation et est donc attribuée aux père et mère mais elle peut être exercée unilatéralement ou conjointement.
- L’enfant doit cohabiter avec ses parents ou avec l’un d’eux.
Sur la dernière condition, il est important de définir juridiquement la notion de cohabitation. La cohabitation entre l’enfant et les parents est une notion juridique qui désigne la vie commune de l’enfant avec ses deux parents ou l’un de ses parents après une séparation ou un divorce. Cette notion est importante car elle est liée aux droits et aux devoirs des parents envers leur enfant.
Selon la Cour de cassation, la cohabitation se définit comme la résidence habituelle de l’enfant au domicile de ses parents ou de l’un deux (Cass. 2ème Civ. 20 janvier 2000, n° 98-14479). Il faut donc prendre en considération la résidence de droit et non celle de fait.
La cohabitation ne cesse donc pas lorsque l’enfant est dans un internat ou séjourne en centre de vacances ou il est chez ses grands-parents.
De même en cas de divorce ou de séparation de corps, la Cour de cassation considère que « l’exercice du droit de visite et d’hébergement ne fait pas cesser la cohabitation avec celui de ses parents qui exerce sur lui le droit de garde » ; en cas de simple séparation de fait entre les parents, la cessation de cohabitation n’étant pas juridiquement reconnue, ceux-ci demeurent tous deux responsables de l’enfant.
Est-ce que les parents peuvent s’exonérer de leur responsabilité ?
La réponse est non. Il n’y a que la force majeure ou la faute de la victime (ou d’un tiers) qui permettra aux parents de s’exonérer de leur responsabilité.
La réalisation du dommage doit donc avoir été irrésistible et imprévisible pour les parents.
Par conséquent, les parents ne peuvent pas s’exonérer de leur responsabilité en prouvant qu’ils n’ont pas commis de faute dans la surveillance ou l’éducation de leur enfant.
C’est pour ces raisons qu’il est conseillé aux parents de souscrire à une assurance couvrant leur responsabilité civile du fait des actes de leurs enfants mineurs.
La responsabilité civile du seul parent en cas de divorce ou de séparation
Dans le cas de parents divorcés ou séparés, si la résidence habituelle est fixée chez l’un des parents (par exemple chez la mère), l’autre parent (par exemple le père) ne peut pas être tenue responsable du fait de ses enfants alors même qu’il exerce conjointement l’autorité parentale et peut bénéficier d’un droit de visite et d’hébergement. Telle est la position de la Cour de cassation.
Sur ce point, une question prioritaire de constitutionnalité a été soumise au Conseil constitutionnel portant sur les mots « habitant avec eux » de l’alinéa 4 de l’article 1242 du code civil.
Les requérants reprochaient à cet alinéa, telle qu’interprétée par une jurisprudence constante de la Cour de cassation, de prévoir que, en cas de divorce ou de séparation, cette responsabilité de plein droit incombe au seul parent chez lequel la résidence habituelle de l’enfant mineur a été fixée, quand bien même l’autre parent exercerait conjointement l’autorité parentale.
Il existerait donc « une différence de traitement injustifiée, entre les parents, déjà, dès lors que seul le parent chez lequel la résidence de l’enfant est fixée est susceptible de voir sa responsabilité engagée de plein droit ; entre les victimes, ensuite, qui n’auraient pas la possibilité de rechercher la responsabilité de plein droit de l’autre parent ».
Par ailleurs, selon les requérants la disposition législative en débat « inciterait le parent chez lequel la résidence de l’enfant n’a pas été fixée à se désintéresser de son éducation. Elle méconnaîtrait ainsi l’exigence constitutionnelle de protection de l’intérêt supérieur de l’enfant, le droit au respect de la vie privée ainsi que le droit de mener une vie familiale normale ».
Dans une décision du 21 avril 2023 (Décision n° 2023-1045 QPC du 21 avril 2023), les juges ont rejeté tous les arguments avancés.
Selon ces derniers, en cas de divorce ou de séparation, le juge peut, en vertu de l’article 373-2-9 du Code civil, fixer la résidence de l’enfant soit en alternance au domicile de chacun des parents, soit au domicile de l’un d’eux. Ainsi, « le parent chez lequel la résidence habituelle de l’enfant a été fixée par le juge ne se trouve pas placé dans la même situation que l’autre parent ».
Dès lors, pour le Conseil constitutionnel, la différence de traitement résultant de la disposition contestée, qui est « fondée sur une différence de situation », est « en rapport avec l’objet de la loi ».
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